Genève défend de nouveau la veuve et l’orphelin

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 A LA RESCOUSSE DE LA VEUVE ET L’ORPHELIN

 

 L’imposition de la famille en tant que telle est un sujet complexe du point de vue de la fiscalité qui a fait l’objet d’une importante circulaire de l’Administration fédérale des contributions en 2010. La pratique en la matière demeure toutefois éparse.

 

La problématique se complexifie d’avantage lorsque d’autres lois viennent se greffer à la casuistique de base notamment lorsque les membres de la famille se voient gratifier de prestations provenant de l’assurance-vieillesse et survivants  (AVS) et de la loi sur la prévoyance professionnelle (LPP).

Ainsi dans cette chronique nous passerons en revue le traitement fiscal des rentes de veuf/veuve, des rentes AVS (complémentaires) pour enfant, des rentes d’orphelins AVS mais également des rentes d’orphelins découlant de la prévoyance professionnelle (rente d’orphelins LPP).

Récemment, l’AGEDEC a été consultée par un contribuable en détresse qui s’est vu attribuer (comme nous le verrons ci-après à tort) les rentes d’orphelins AVS et LPP destinées aux enfants majeurs.

Du point de vue de la loi sur l’assurance-vieillesse et survivants

Les lois fiscales (tant cantonales que fédérale) prévoient que les revenus provenant de l’assurance-vieillesse et survivants de l’assurance invalidité ainsi que tous ceux provenant d’institutions de prévoyance professionnelle sont imposables chez le contribuable.

Les  revenus de la prévoyance reposent sur la conception dite des « trois piliers » ancrée dans la Constitution fédérale.

Du point de vue fiscal, les rentes de l’AVS constituent un revenu de l’ayant-droit dès l’échéance de la prestation, alors que du point de vue des assurances sociales, c’est la décision  d’octroi de la rente qui constitue l’échéance et fonde donc le revenu auprès de l’ayant-droit.

Le droit à la rente de veuf/veuve répond aux conditions suivantes :
  • La rente de veuf/veuve est due au conjoint survivant ayant un ou plusieurs enfants étant précisé que les enfants visés sont ceux qui faisaient ménage commun avec la veuve/le veuf et qui sont recueillis par le survivant.
  • Une rente de veuf/de veuve est également due au conjoint survivant qui ne recueille pas d’enfants, mais qui a atteint 45 ans pour autant que le mariage ait duré 5 ans au moins, en cas de mariage successif, le cumul de la durée des différents mariages fait foi.
  • Elle s’éteint :
    • par le remariage, mais renait en cas d’annulation du mariage ou de divorce ;
    • par le décès de la veuve/du veuf ;
    • lorsque le dernier enfant atteint l’âge de 18 ans révolu ;

L’ex-conjoint divorcé est assimilable à une veuve/un veuf si elle a – au moment du décès –

  • un ou plusieurs enfants et que le mariage a duré au moins 10 ans ;
  • si le mariage a duré moins de 10 ans mais si le divorce a eu lieu après que la personne divorcée a atteint 45 ans révolus ;
  • si le cadet a eu 18 ans révolus après que la personne divorcée a atteint 45 ans révolus ;
  • dans tous les cas le conjoint divorcé a droit à une rente de veuf/de veuve s’il a des enfants de moins de 18 ans.
La rente d’orphelin répond aux conditions suivantes :
  • l’enfant dont le père ou la mère est décédé a droit à une rente d’orphelin et à une double rente en cas de décès des deux parents ;
  • le droit s’éteint au 18ème anniversaire ou au décès de l’orphelin ;
  • dans le cas où l’orphelin suit une formation, le droit s’éteint au terme de cette formation mais au plus tard lorsqu’il atteint l’âge de 25 ans révolu.
La rente pour enfant complémentaire à la rente AVS répond aux conditions suivantes :
  • une personne au bénéfice d’une rente AVS, soit un homme ayant atteint l’âge de 65 ans révolus, une femme ayant atteint  l’âge de 64 ans révolus, a droit – en plus de sa rente AVS – à « une rente pour enfant » si lors de son décès, son enfant aurait droit à  une rente d’orphelin.

Il convient donc de différencier, la rente de veuf/de veuve et la rente pour enfant qui sont toujours imposables auprès du parent ayant droit, de la rente d’orphelin qui est imposable auprès du parent uniquement si l’enfant est mineur.

En effet, selon la systématique fiscale usuelle, les revenus des enfants mineurs sont ajoutés à ceux des parents qui détiennent l’autorité parentale.

La rente d’orphelin sera imposée directement chez l’enfant une fois que l’âge de la majorité sera atteint, soit dans l’année où il atteint 18 ans révolus.

C’est spécifiquement dans ce cadre que des erreurs peuvent intervenir entrainant taxations erronées sachant que les libellés des rentes peuvent porter à confusion.

Du point de vue de la rente d’orphelins LPP

En matière de prévoyance professionnelle, c’est avant tout la loi qui fixe les modalités mais le règlement peut contenir – selon les cas- des règles dérogatoires.

La rente LPP, dans la logique des 3 piliers, suit pour ainsi dire le même sort que la rente d’orphelins AVS, dès lors la rente pour orphelins LPP doit être imposée dans le chef de l’enfant crédit-rentier, c’est-à-dire de l’enfant dont la rente est destinée, une fois l’âge de la majorité atteinte.

Conclusion

Le parent dont les enfants reçoivent des rentes d’orphelins AVS, respectivement des rentes d’orphelins LPP, le cas échéant un cumul des deux, ne doit se voir imputer les rentes d’orphelins AVS / LPP uniquement dans la mesure où les enfants n’ont pas atteint l’âge de la majorité. Une fois que l’enfant est dans l’année de ses 18 ans, la rente entière (courant sur toute l’année) doit être imposée dans le chef de l’enfant devenu majeur.

Dans tous les cas, les rentes de veuf/veuve ainsi que les rentes AVS (complémentaire) pour enfant sont toujours imposable auprès de l’ayant droit, soit auprès du parent.

En cas de contestation, il convient bien entendu d’adresser une réclamation à l’Administration fiscale cantonale dans les 30 jours dès la réception du bordereau.

L’AGEDEC a constaté une pratique uniforme de la part de l’Administration depuis l’apparition de la circulaire de 2010 sur l’imposition de la famille. Les cas querellés ont trait à des confusions et des erreurs de qualification des rentes versées aux ayants droits et ont pu être réglés en conformité avec les dispositions légales topiques.

Aussi il convient d’être circonspect lors de la rédaction de la déclaration d’impôt afin d’éviter toute erreur de qualification des rentes.

Publiée le 25 janvier 2016

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Par Maître Michel LAMBELET Avocat – expert en fiscalité.

Tout l’immobilier, la Chronique de l’AGEDEC, (Association genevoise pour la défense du contribuable), association créée en 2005 dont les membres fondateurs ont été Monsieur et Madame LARPIN ainsi que Me LAMBELET.

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