Transfert immobilier avec réserve de l’usage

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TRANFERT IMMOBILIER AVEC RÉSERVE DE L’USAGE 

 

Bien que suite à un transfert avec réserve de l’usufruit, le contribuable des impôts immobiliers ne change pas, ce type de transfert à des conséquences fiscales non négligeables.

 

Il est fréquent qu’un propriétaire d’un bien immobilier souhaite le transférer tout en conservant, le plus souvent sa vie durant, l’usage de ce bien.

Plusieurs cas de figure peuvent alors être envisagés, soit une vente ou une donation avec réserve d’usufruit ou grevée d’un droit d’habitation.

La présente chronique s’attachera uniquement aux transferts avec réserve d’usufruit.

Détention du bien immobilier

Pour illustrer les conséquences fiscales et financières d’un tel transfert prenons l’exemple d’un contribuable genevois veuf âgé de 68 ans ayant acquis un bien immobilier dans le canton de Genève il y a 20 ans pour un prix de CHF 800’000.-  (valeur fiscale actuelle de CHF 960’000.- et valeur locative (IFD) de CHF 22’000.-); bien immobilier qu’il occupe depuis lors et qui est encore grevé d’une hypothèque de CHF  400’000.- portant intérêts à 2,5%.

La situation que connaît le contribuable avant la vente est la suivante :

  • Impôt foncier à sa charge CHF 960.- (1%0 de la valeur fiscale sans abattement)
  • Impôt sur la fortune immobilière (hypothèses de travail : taux ½% jusqu’à 1mio, puis 1% au-delà) CHF 880.- (valeur fiscale sous déduction de 40% d’abattement moins la dette hypothécaire : 960’000 x60% soit 576’000 moins 400’000 = 176’000 au taux de ½%)
  • Charge hypothécaire : CHF 10’000.-
  • Valeur locative IFD  nette de frais immobiliers et d’intérêts hypothécaires: CHF 7’600.- (valeur locative sous déduction du forfait de frais immobiliers de 20% et de la charge hypothécaire)
  • Valeur locative ICC  nette de frais immobiliers et d’intérêts hypothécaires: CHF 560.- (valeur locative IFD après abattement de 40% sous déduction du forfait de frais immobilier de 20% et de la charge hypothécaire)
  • Impôts sur le revenu (hypothèses de travail : taux IFD 5% et taux ICC 15%) : CHF 464.- (IFD 380.- et ICC 84.-)

 En résumé, le contribuable supporte par année CHF 10’000.- de charge hypothécaire et CHF 2’304.- de charges fiscales.

Vente avec réserve d’usufruit

La valeur vénale du bien est estimée à CHF 1’800’000.-.

L’usufruit est estimé selon les règles fiscales en la matière à savoir que si l’usufruitier est âgé de 60 à 69 ans révolus l’usufruit équivaut à ¼ de la valeur du bien immobilier, soit en l’occurrence à CHF 450’000.-.

Le contrat de vente aura donc schématiquement la teneur suivante : achat de la nue-propriété pour CHF 1’350’000.- avec reprise de la dette hypothécaire de CHF 400’000.- soit un paiement en mains du vendeur de CHF 950’000.-.

Situation des parties lors de de la vente :

Pour l’acheteur :

  • Versement au vendeur de CHF 950’000.-
  • Reprise de la dette hypothécaire de CHF 400’0000.-
  • Paiement des droits de mutation et d’enregistrement en CHF 59’400.- (3,3% du prix sans déduction de la réserve d’usufruit au profit du vendeur et bien entendu sans déduction du financement (dettes))
  • Paiement des frais d’acte du notaire (pour mémoire)

Pour le vendeur :

  • Obtention du vendeur d’un paiement de CHF 950’000.-
  • Cession de la dette hypothécaire de CHF 400’000.-
  • Paiement de l’IBGI (impôt sur le gain immobilier) de CHF 41’400.- (1’350’000 moins 960’000 x 130% x ¾ soit 414’000 au taux de 10%)

Situation que connaissent les contribuables après la vente:

Pour l’acheteur :

  • Dès lors que la fortune grevée d’usufruit est imposable auprès de l’usufruitier, l’acheteur ne verra pas sa fortune augmentée de l’immeuble
  • Diminution de fortune du prix de la nue-propriété de l’immeuble achetée soit CHF 1’409’500.- (CHF 950’000.-versé au vendeur, CHF 400’000.- de dette reprise et CHF 59’400.- de frais)

Pour le vendeur :

  • Impôt foncier à sa charge CHF 1’800.- (1%0 de la nouvelle valeur fiscale sans abattement)
  • Augmentation de la fortune mobilière et immobilière : CHF 1’988’600.- (nouvelle valeur fiscale de l’immeuble sous déduction de 40% d’abattement plus complément de fortune mobilière soit 1’080’000 (1’800’000 x 60%) plus 950’000 (paiement du l’acheteur) moins 41’400 (IBGI)
  • Impôts sur la fortune (½% jusqu’à 1mio, puis 1% au-delà) CHF 14’886.-
  • Charge hypothécaire : CHF 10’000.-
  • Valeur locative IFD  nette de frais immobiliers et d’intérêts hypothécaires: CHF 7’600.-
  • Valeur locative ICC  nette de frais immobiliers et d’intérêts hypothécaires: CHF 560.-
  • Impôts sur le revenu (hypothèses de travail : taux IFD 5% et taux ICC 15%IFD) : CHF 464.- (IFD 380.- et ICC 84.-).

En résumé, le contribuable – qui supporte toujours CHF 10’000.- de charge hypothécaire – doit désormais s’acquitter CHF 17’150.- de charges fiscales annuelles.

Donation avec réserve d’usufruit

Dans la pratique, l’on rencontre souvent non pas une vente mais une donation avec réserve d’usufruit lorsque qu’il s’agit d’une opération conduite en famille (par exemple de père à fils/fille)

Les conséquences seront les suivantes compte tenu des mêmes hypothèses que celles traitées ci-avant en cas de vente.

Le contrat de donation aura donc schématiquement la teneur suivante : donation de la nue-propriété de l’immeuble grevée de la dette hypothécaire de CHF 400’000.- au donataire.

Situation des parties lors de de la donation :

  • Paiement des droits de donation sur la valeur de donation, à savoir valeur vénale de l’immeuble donné sans tenir compte de la réserve d’usufruit faite au profit du donateur sous déduction des dettes contractées par le donateur plus d’une année avant la donation et mise à la charge du donataire ; en l’occurrence CHF 0.- (CHF 1’400’000.- au taux de 0% (donation en ligne directe et donateur n’était pas au bénéfice d’une imposition « au forfait » lors d’une des trois dernières décisions de taxation définitives))
  • Paiement des frais d’acte du notaire (pour mémoire)
  • Aucun paiement d’IBGI (impôt sur le gain immobilier) dès lors que l’imposition est différée en cas de transfert de propriété par donation

Situation que connaissent les contribuables après la donation:

Pour le donataire :

  • Dès lors que la fortune grevée d’usufruit est imposable auprès de l’usufruitier, le donataire ne verra pas sa fortune augmentée de l’immeuble
  • Diminution de fortune à concurrence de la dette reprise

Pour le donateur:

  • Impôt foncier à sa charge CHF 1’800.- (1%0 de la nouvelle valeur fiscale sans abattement)
  • Augmentation de la fortune: CHF 1’480’000.- (nouvelle valeur fiscale de l’immeuble sous déduction de 40% d’abattement plus complément de fortune mobilière soit 1’080’000 (1’800’000 x 60%) plus 400’000 (reprise de dette par le donataire)
  • Impôts sur la fortune (½% jusqu’à 1mio, puis 1% au-delà) CHF 9’480.-
  • Charge hypothécaire : CHF 10’000.-
  • Valeur locative IFD  nette de frais immobiliers et d’intérêts hypothécaires: CHF 7’600.-
  • Valeur locative ICC  nette de frais immobiliers et d’intérêts hypothécaires: CHF 560.-
  • Impôts sur le revenu (hypothèses de travail : taux IFD 5% et taux ICC 15%IFD) : CHF 464.- (IFD 380.- et ICC 84.-).

En résumé, le contribuable (donateur) – qui supporte toujours CHF 10’000.- de charge hypothécaire – doit désormais s’acquitter CHF 11’744.- de charges fiscales annuelles.

 Conclusions

Le transfert d’un bien immobilier avec réserve d’usufruit doit être soigneusement examiné puisque la vente, respectivement la donation, induit notamment des modifications d’estimations du bien transféré ainsi que des déplacements de fortune taxable qui conduisent dans notre exemple à ce que le propriétaire du bien immobilier supporte annuellement une charges fiscale non plus de CHF 2’304.- mais de CHF 17’150.- (vente) ou de CHF 11’744.-(donation) !

Publiée le 12 décembre 2016

 
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