Et si le peuple s’exprimait ?

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La présentation des comptes de l’Etat de Genève pour l’année 2011 montre l’extrême faiblesse des finances de l’Etat nonobstant des revenus fiscaux pour l’exercice 2011 plus importants que prévu.

La débilité des comptes de l’Etat est due notamment à la situation financière catastrophique des caisses de pension publiques.

Progression des revenus fiscaux

Selon le compte rendu publié dans la FAO, les « revenus fiscaux de l’exercice 2011 se chiffrent à 6,1 milliards de francs, soit 379 millions de plus que prévu au budget (+6,6%) ».

Il est précisé que cet écart «provient exclusivement des corrections sur les exercices précédents», c’est-à-dire en d’autres termes que l’on avait sous-estimé les entrées fiscales des années précédentes et que ces sous-estimations sont réapparues en 2011.

En outre, il est également précisé que l’impôt des personnes physiques a progressé par rapport à celui de 2010.

L’hémorragie des caisses de pension

Alors que d’aucuns tirent depuis de nombreuses années la sonnette d’alarme concernant la structure des caisses de pension publiques, notamment sur le fait que d’ores et déjà dans les années 2002, le déficit s’élevait à quelque 2 milliards de francs, soit l’équivalent de la perte essuyée par le canton de Genève dans le déconfiture de sa banque cantonale, les éléments apportés dans la presse et dans le rapport du Conseil d’Etat sont édifiants puisqu’il apparaît:

  • Le degré de couverture des caisses de pension publiques est inférieur à 55%;
  • La nouvelle loi fédérale relative aux institutions de prévoyance de droit public impose la couverture intégrale des engagements envers les retraités à partir du 1er janvier 2014.
  • Malgré cette injonction législative, il est prévu des dispositions transitoires permettant que le taux de couverture des caisses atteigne 80% (au lieu de 100%) dans 40 ans…
  • Pour ce qui est des caisses du canton de Genève, le rapport du Conseil d’Etat précise: « Entre fin 2007 et fin 2011, les engagements de prévoyance de la CIA (caisse de prévoyance du personnel enseignant de l’instruction publique et des fonctionnaires de l’Administration du canton de Genève) et de la CEH (caisse de prévoyance en faveur du personnel des établissements publics médicaux du canton de Genève) sont passés de 2,9 à 6,3 milliards de francs ».
  • Si l’on voulait atteindre un taux de couverture de 100%, c’est donc en chiffres ronds quelque 6 milliards de francs qu’il faudrait injecter dans les caisses de pension publiques.
  • Au surplus, l’abaissement du taux d’intérêt technique de référence à 3,5% dès 2012 induit une détérioration supplémentaire d’environ 1 milliard de francs du taux de couverture des deux caisses de l’Etat.

Ainsi, pour atteindre en 40 ans un taux de conversion de 80%, ce n’est pas quelque 100 à 150 millions qu’il faudrait injecter annuellement (et pendant 40 ans) mais quelque 300 millions par année compte tenu des intérêts et des manques à gagner sur les montants manquants dans les caisses de pension.

Légal ou supra légal ?

Tout d’abord il faut rappeler qu’outre l’AVS (1er pilier), tout employé en Suisse doit être affilié à un deuxième pilier (pilier 2a).

Ce n’est que facultativement et si l’employeur dispose de ressources suffisantes que l’on peut prévoir une caisse de pension supra légale (pilier 2b).

Compte tenu du fait que la presse a publié récemment que le salaire moyen de la fonction publique s’élevait à CHF 9’000.-, il faut savoir que les employés des PME genevoises à revenu égal et qui sont affiliés à une caisse de pension légale (2a) disposeront à leur retraite d’un montant en capital de quelque CHF 350’000.-.

Dans le cadre des caisses de retraite de la fonction publique, à rémunération égale, le retraité disposera de trois fois le montant prévu légalement, soit CHF 1’000’000.-.

Il est vrai qu’à l’heure actuelle, avec un taux de couverture de quelque 50%, ce n’est « que » CHF 500’000.- qui sera acquis, soit quand même 40% de plus que le montant légal.

Comme l’on a pu le constater, entre 2007 et 2011, soit en quatre ans, la situation s’est péjorée du double passant de 3 milliards à quelque 6 milliards de francs d’engagement non couverts.

La situation est donc dramatique et il faut stopper l’hémorragie !

Première solution: privatiser les caisses de pension publiques comme l’Etat fédéral l’a fait il y a quelques années; mais cela reviendrait à dire que l’Etat de Genève devrait immédiatement débourser les quelque 50% des fonds manquants dans les caisses de pension publiques, soit verser quelque 6 milliards de francs à la nouvelle caisse privée.

Deuxième solution: fermer les caisses de pension actuelles pour permettre leur assainissement et leur remboursement durant les prochaines années et rouvrir parallèlement une nouvelle caisse, privée ou publique, mais de type légal (pilier 2a). En tenant compte qu’il semble manifeste que l’Etat de Genève n’a pas les moyens de continuer dans le supra légal comme pourrait le faire éventuellement une entreprise florissante.

Troisième solution: se «boucher le nez et les oreilles» et continuer sur la voie suivie depuis des lustres en tentant de trouver quelque 300 millions par année durant les 40 prochaines années tout en sachant que l’on aura atteint alors que le 80% du taux de couverture et qu’il faudra encore faire l’effort d’aller à 100%.

Avis des citoyens

Quelle que soit la solution choisie, l’avis des citoyens doit être expressément demandé.

En effet, les citoyens genevois sont le quatrième cotisant aux caisses de pension de l’Etat puisque depuis des années c’est le déficit qui « couvre » les errements des caisses de pension publiques.

Ce ne sont pas les réserves de l’Etat qui vont permettre de verser les quelque 6 milliards de déficit actuel d’une part, et ce ne sont pas les entrées habituelles d’impôt qui permettront de continuer à faire bénéficier tous les employés de l’Etat d’une caisse supra légale, alors que manifestement l’Etat de Genève n’est plus en mesure de proposer autre chose qu’une caisse de pension légale (qui – au demeurant – est d’ores et déjà l’un des systèmes les plus généreux d’Europe vis-à-vis des retraités).

S’agissant de l’avis des citoyens, l’on parle certes des citoyens contribuables pour ce qu’il en est d’une éventuelle augmentation d’impôt pour couvrir les dépenses de caisses de pension supra légales d’une part, mais également de tous les citoyens non contribuables (en raison de leur âge ou de leur situation financière) dès lors que l’endettement du canton de Genève se reporte sur chacun des citoyens du canton sans égard à leur situation financière d’autre part.

En d’autres termes, le déficit actuel de quelque 6 milliards de francs des caisses de pension correspond, pour chacun des 440000 citoyens que compte le canton de Genève, à un endettement de quelque CHF 13’500.- par personne.

Ne pas se leurrer

De prime abord, l’on pourrait penser que l’assainissement des caisses de pension, en passant à un nouveau système pour l’avenir de caisse légale (2a), représente une restriction des droits des employés disposant d’un contrat de droit public, mais en fait c’est une mesure de protection également de leurs droits dès qu’il ne faut pas se voiler la face si le taux de couverture de leur caisse s’élève à quelque 50% maintenant, cela veut dire que 50% de tout ce qu’ils ont mis dans leur caisse de pension a été d’ores et déjà perdu et qu’il faudra bien le payer une seconde fois, certes peut-être avec l’aide de l’Etat, mais il n’en demeure pas moins qu’ils devront à nouveau payer des prestations qu’ils ont d’ores et déjà financées.

Augmentation du pouvoir d’achat

Ce qui est intéressant, c’est le fait qu’en passant d’une caisse de pension supra légale à une caisse de pension légale, cela permettrait d’augmenter le pouvoir d’achat de la fonction publique dès lors que les retenues au titre de leur caisse de pension seraient plus faibles que celles auxquelles elle doit contribuer actuellement.

Certes, leurs avoirs de retraite deviendraient moindres que ce qu’on leur fait croire à l’heure actuelle (si le taux de couverture était de 100%), mais cela n’est-il pas d’une certaine façon juste puisque les autres citoyens du canton disposent – pour la plupart – que d’une retraite de type légale ?

Et pour ceux qui disposeraient d’un système plus généreux, il est totalement financé par eux-mêmes et par les fonds générés par leur entreprise !

Conclusion

En cas de changement de système pour une caisse de pension légale plutôt que supra légale, c’est une économie de plus de 150 millions de francs par année que pourrait réaliser l’Etat.

Mais indépendamment de cela, les questions de savoir comment l’on doit régler le problème du déficit abyssal des caisses de pension du canton de Genève d’une part et si l’on doit ou non continuer de faire bénéficier une partie de la population d’une caisse de pension supra légale (payée par les impôts de la totalité de la communauté des contribuables genevois et par l’endettement de la totalité des citoyens) d’autre part, devront être posées expressément aux citoyens de ce canton et selon leur réponse il conviendra d’établir en conséquence un plan de redressement des caisses de pension publiques.

 

Publié le 4 juin 2012

 

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