Le temps des donations

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Au regard des modifications éventuelles des droits de succession qui pourraient survenir, il serait peut-être judicieux de prévoir dès 2012 des donations.

Actuellement, les droits de succession, respectivement de donation, sont de la compétence des cantons et chacun d’eux est libre de légiférer à sa guise.

Hormis quelques cantons suisses qui ne connaissent pas de droits de succession, ni de droits de donation, les autres cantons ont développé des législations ad hoc.

Dans le canton de Genève, des droits de succession et de donation existent mais certaines catégories en sont exemptées, ou le taux afférent peut être à 0.

Ainsi, les successions, respectivement donations, survenant entre conjoint survivant et en ligne directe de parenté, sont exonérées de toute imposition.

Initiative populaire fédérale

La fiscalité successorale pourrait subir des changements drastiques par l’avènement de l’initiative populaire fédérale intitulée « Imposer les successions de plusieurs millions pour financer notre AVS » si elle était acceptée.

En effet, cette initiative, de façon résumée, prévoit une modification de la Constitution pour élever les droits de succession, respectivement de donation, au niveau fédéral privant les cantons de légiférer à leur guise.

Cette initiative, qui a d’ores et déjà fait parler d’elle, se trouve actuellement dans la phase de récolte de signatures et lorsque le nombre de signatures requis sera atteint, elle fera l’objet d’un dépôt formel qui aboutira à une votation populaire.

Elle prévoit un taux d’imposition pour les successions, respectivement les donations, de 20% quels que soient les liens de parenté entre le défunt et les héritiers, respectivement le donateur et le donataire.

Outre le conjoint survivant, seront exonérées de cet impôt de 20% une franchise de CHF 2’000’000.- du legs et des donations soumises à l’impôt.

En d’autres termes, au décès d’une personne, sera soumise la masse successorale totale si elle excède 2 millions étant précisé que seront soustraites de ces 2 millions de francs d’exonération toutes les donations survenues dès le 1er janvier 2012.

Par ailleurs, une autre exonération est prévue, à savoir les « présents » (donations) d’un montant maximum de CHF 20’000.- par an et par donataire (étant précisé que ce montant pourra être adapté périodiquement en fonction du renchérissement).

Période transitoire ou pas

Ne sachant pas à l’avance si cette initiative concernant la réforme de la fiscalité successorale sera finalement déposée et acceptée par le peuple, deux cas de figure peuvent se présenter, à savoir:

  • soit il y a une période transitoire à compter du 1er janvier 2012 (date de reprise des donations éventuelles) jusqu’à la date d’entrée en vigueur des futures dispositions successorales fédérales,
  • soit il n’y a pas de période transitoire, puisque le droit actuel perdurera vu le refus ou le retrait de l’initiative visant à la réforme de la fiscalité successorale.

Dispositions à envisager

Si l’on considère que l’initiative n’offre aucune chance d’aboutir et d’être acceptée par le peuple, il n’y aura pas de disposition transitoire et alors c’est la situation que l’on connaît actuellement qui présidera à toute réflexion.

Ainsi, tant pour les futurs conjoints survivants, que les héritiers en ligne directe, toute donation peut être effectuée, dans le canton de Genève, selon les dispositions légales actuelles, en franchise d’impôt.

En revanche, si l’on considère l’éventualité d’un changement de fiscalité successorale suite à l’avènement de cette initiative, il y a une période transitoire (période avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions) et une période après l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions.

Sachant qu’il va se passer plusieurs années avant que l’initiative soit formellement déposée et passée en votation devant le peuple, la période transitoire sera donc assez longue.

Conséquences

Tout d’abord, après l’avènement des dispositions fédérales de fiscalité successorale (période post transitoire), une donation ne sera soumise à aucun droit de donation à concurrence de 2 millions de francs suisses (cumul de toutes les donations depuis le 1er janvier 2012).

Lors du décès d’une personne, sa succession ne fera l’objet d’aucun droit de succession si elle n’excède pas 2 millions de francs.

En revanche, pour calculer le montant du « legs » à son décès, l’on additionnera la valeur vénale des actifs sous déduction des passifs au moment du décès, mais l’on reprendra également toutes les donations soumises à impôt faites par le défunt.

En d’autres termes, cela veut dire que si le défunt a procédé depuis le 1er janvier 2012 à des donations pour 1 million de francs et qu’il laisse à son décès des biens pour 1,5 million de francs, il ne sera pas exempté des droits de succession puisqu’au 1,5 million de franc l’on rajoutera le 1 million de donation, soit 2,5 millions de franc pour lesquels il faudra acquitter 20% de la part excédant 2 millions, soit 20% de CHF 500’000.-

Toutes les donations non soumises à l’impôt ne seront pas reprises, il s’agit donc des donations d’un montant maximal de CHF 20’000.- par an et par donataire.

Des donations non soumises à l’impôt

Une personne peut d’ores et déjà – dans le canton de Genève – donner chaque année à chacun de ses enfants un montant de CHF 20’000.- en franchise d’impôt et, nous l’avons vu, ce montant ne sera pas repris en cas d’acceptation de l’initiative sur la réforme de la fiscalité successorale.

Mais elle peut également donner la nue-propriété de certains biens mobiliers (par exemple donner la nue-propriété d’un compte bancaire, etc.). Dans ce cas se pose la question d’estimer la valeur de la donation en nue-propriété.

Habituellement, l’on tient compte de l’âge de l’usufruitier pour déterminer la valeur de la nue-propriété.

C’est ainsi que dans le cadre de l’estimation des droits d’enregistrement dans le canton de Genève, il est prévu que l’on estime la nue-propriété en retranchant de la valeur du bien le montant de l’usufruit qui correspond à la moitié de la valeur du bien grevé de l’usufruit si l’usufruitier est âgé de moins de 50 ans, sur le tiers s’il est âgé de 50 à 59 ans, sur le quart s’il est âgé de 60 à 69 ans et sur le huitième s’il est âgé de plus de 69 ans.

Ainsi donc, il apparaît par analogie qu’à une donation annuelle de CHF 20’000.- en pleine propriété pourrait correspondre à une donation en nue-propriété de CHF 40’000.- si l’usufruitier est âgé de moins de 50 ans, ou de CHF 30’000.- s’il est âgé de 50 à 59 ans, voire de CHF 26’666.- s’il est âgé de 60 à 69 ans et enfin de CHF 22’857.- s’il est âgé de plus de 69 ans.

Conclusion

Chacun devra évaluer sa situation en fonction de son patrimoine mais en tout état, l’on devra avoir à l’esprit que chaque année qui passe est une année qui ne pourra pas être rattrapée puisque le montant exonéré dans les nouvelles dispositions contenues dans l’initiative visant à la réforme de la fiscalité successorale est fixé à un maximum par an et par donataire.

Publié le 16 juillet 2012

 

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