Les fossoyeurs de l’équité

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Beaucoup ont glosé (en pour ou en contre) sur l’initiative déposée par le Parti socialiste, qui fait l’objet de la votation du 28 novembre prochain, mais ceux-là même qui la proposent et en discutent ne sont-ils pas de fait les fossoyeurs de l’équité ?

Des déficits publics

Tout politique ayant participé à l’avènement de déficits publics récurrents devrait s’abstenir de parler de capacité contributive et de respect de la volonté populaire dès lors que les déficits de fonctionnement récurrents (déficits créés par des excédents de charge de fonctionnement et non pas par des dépenses liées à l’investissement) constituent notamment à Genève, en une violation de la loi et un détournement de la démocratie.

En effet:

  • tout déficit lié à des charges de fonctionnement ne pouvant être couvert dans un futur immédiat par d’autres recettes que des impôts, constitue de fait des impôts supplémentaires mis à charge des citoyens en violation des lois existantes;
  • « les déficits publics ne sont rien d’autre que des impôts non votés, non consentis et donc non démocratiques. Les emprunts publics, en définitive, se transmutent en un vol étatique ». (Victoria Curzon Price, économiste genevoise)

Voilà pour le respect de la légalité, mais au niveau de l’équité, l’on notera que ces déficits – ne pouvant être couverts par les impôts perçus – sont donc à charge de la population « par tête ».

Genève, par exemple, avec ses 20 milliards de déficits cumulés (selon la statistique fédérale) présente une dette par habitant de CHF 44’400.- (et de CHF 26’600.- si l’on s’en tient à la thèse officielle genevoise d’une dette cumulée d’environ 12 milliards).

Aussi, considérant qu’il n’y a plus que des débiteurs de cette dette et non plus des contributeurs selon leur capacité contributive, l’on peut légitimement affirmer que les politiques créateurs de déficits récurrents sont de fait les fossoyeurs de l’équité (concrétisée notamment par le respect de la capacité contributive).

De la TVA

Ceux-là même qui proposent une « initiative pour des impôts équitables » étaient pour l’introduction d’une TVA en Suisse d’une part, et sa hausse dès l’année prochaine à 8% d’autre part, pourtant il s’agit d’un impôt à taux fixe frappant toute personne de la même façon (à tout le moins en ce qui concerne les dépenses liées aux besoins fondamentaux de tout citoyen).

De l’équité à sens unique

L’initiative stigmatise – notamment – les cantons qui ne frappent pas d’une imposition marginale de 22% minimum les revenus excédant CHF 250’000.-, mais pas les cantons qui maltraitent leurs contribuables modestes.

Il s’agit là d’une demande «d’équilibrage» à sens unique, c’est-à-dire que les cantons ayant pu conduire leurs ménages en demandant une quotité restreinte d’impôt apparaissent comme des mauvais cantons par rapport aux cantons qui sont incapables de boucler leur budget et sont d’une gourmandise effrénée quant aux impôts demandés à leurs citoyens.

Certes pour Genève, l’initiative ne va pas changer la taxation des personnes ayant un revenu de CHF250’000.- puisqu’elles sont déjà taxées bien au-delà des 22% requis.

En revanche, il est intéressant de relever qu’à Genève ce taux de 22% frappe déjà les célibataires disposant d’un revenu annuel taxable supérieur à CHF 33’000.- et les mariés disposant d’un revenu supérieur à CHF 66’000.- !

L’équité commande que l’on réprime prioritairement (car les contribuables concernés sont bien plus nombreux…) les abus à l’encontre des classes à revenus modestes et moyens.

L’on rappellera également que Genève avait concrétisé dès 2001 un système fiscal où le premier franc d’impôt qui frappait les contribuables était de l’ordre de 19%, alors qu’au niveau fédéral ce taux était de 1%.

Par ailleurs, comment admettre au niveau également de l’équité, que des cantons se permettent d’être huit fois plus chers en terme d’impôt sur la fortune que d’autres cantons (et à tout le moins 200% plus chers que le montant minimum fixé dans l’initiative dont il est question présentement).

De l’équité et du niveau de vie

Sur le terrain de l’équité, il conviendrait de tenir compte du coût de la vie dans tel ou tel canton.

En effet, pour un revenu net après impôt identique, il n’en demeurerait pas moins que le contribuable citoyen doit s’acquitter encore de charge indispensable telle que son loyer.

Dès lors, si Genève, pour ne parler que de ce canton, voulait avancer dans la voie de l’équité, il devrait connaître d’impôts inférieurs à ceux des cantons dont le coût de la vie est inférieur, notamment au regard du coût des logements (car si les logements sont inexistants et chers, c’est la conséquence d’une incurie de l’Etat en la matière).

Conclusion

Pour des impôts équitables, la solution ne vient pas dans la pénalisation des cantons pouvant se permettre d’avoir une fiscalité moins outrancière que les mauvais cantons de Suisse, mais bien plus sur un respect d’une progressivité de l’impôt en fonction des besoins des citoyens contribuables, compte tenu de leurs charges indispensables et incompressibles en fonction de leur lieu de domicile.

Ce n’est pas le point d’accroche de l’impôt en début et à la fin des courbes des barèmes qui est important, mais bien plus la progressivité des différentes augmentations de taux prévues par lesdits barèmes.

A cet égard la progressivité du barème de l’impôt fédéral est exemplaire.

 

Publié le 22 novembre 2010

 

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