On ne doit pas punir les repentis

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ON NE DOIT PAS PUNIR LES REPENTIS

 

Le Tribunal fédéral a confirmé récemment que les dettes fiscales résultant d’un rappel d’impôts devaient être traités de la même façon que les autres dettes du contribuable.

 

La saga des dettes fiscales

Par le passé, c’est-à-dire avant l’avènement de la nouvelle loi fiscale entrée en vigueur au 1er janvier 2001, la déductibilité des dettes était relativement simple puisque l’on connaissait un système de taxation praenumerando, c’est-à-dire que l’on établissait une déclaration pour, par exemple, l’année 1999 en se basant sur les faits et éléments de l’année précédente, savoir l’année 1998. La déduction des dettes au 31 décembre 1998 allait donc de soit lorsque l’on rédigeait la déclaration pour le période fiscale 1999.

Après avoir changé de système de taxation pour adopter le système intitulé « post numerando» c’est-à-dire que, depuis l’année fiscale 2001, l’année de taxation chevauchait l’année de calcul.

La question s’était donc posée de savoir si par exemple l’on pourrait déduire de la déclaration fiscale le montant d’impôts que l’on devrait payer pour la même année fiscale.

Cette question avait été résolue par une décision de la Commission cantonale de recours en matière d’impôts (devenue depuis lors le Tribunal administratif de première instance) en 2006.

Dette de rappels d’impôts

Depuis lors, il semblait que la question avait été résolue. Mais c’était sans compter un revirement de l’AFC au regard des nombreuses de déclarations dites spontanées qui impliquaient des reprises d’impôts sur les années précédentes.

L’Administration fiscale entendait faire une distinction entre les dettes fiscales ordinaires et les dettes de rappels d’impôts pour n’admettre que les premières et refuser la déduction des secondes.

Les contribuables ont réagi et c’est dans ce cadre que l’AGEDEC est intervenue pour en défendre un certain nombre.

Situation kafkaïenne

Dans les diverses procédures qui lui ont été soumises, le Tribunal administratif de première instance est resté fidèle à sa position, à savoir d’accorder la déductibilité des dettes qu’elles soient ordinaires ou de rappels d’impôts.

L’Administration insatisfaite a donc recouru auprès de la Cour de justice et diverses décisions ont été rendues.

C’est ainsi qu’un premier arrêt de la Cour de justice a confirmé la déductibilité des dettes de rappel d’impôts ce qui a conduit l’Administration à déclarer renoncer à poursuivre ses autres procédures.

Cependant dans le cadre d’une autre affaire pendante devant elle, la Cour de justice – avant même d’avoir pu prendre acte du retrait de l’AFC de son opposition -  a rendu un arrêt allant à l’encontre de la décision précédente de la même Cour de justice !

Saisie du Tribunal fédéral

C’est ainsi que très curieusement et bien que l’Administration avait déclaré retirer son recours près la Cour de justice, l’AGEDEC, pour le compte du contribuable concerné, a été contrainte de faire déposer un recours près le Tribunal fédéral pour faire annuler cette nouvelle décision, de la Cour de justice.

Décision du Tribunal fédéral

Par un arrêt du 22 juin 2015, le Tribunal fédéral a confirmé que les dettes de rappel d’impôts, à l’instar des dettes fiscales pouvaient être déduites de la fortune brute même si elles n’étaient pas encore chiffrées à la date déterminante, dès lors qu’elles étaient dues en vertu de la loi.

Le Tribunal fédéral a rappelé :

  • que, selon le principe de périodicité, la cause juridique et fait générateur de la dette devait être réalisé au moment déterminant pour l’imposition de la fortune.
  • Qu’il s’ensuivait donc que l’échéance de la dette ne constituait pas une condition de la déduction de la dette.
  •  Qu’ainsi à teneur des dispositions légales, la fortune imposable se déterminait d’après son état à la fin de la période fiscale soit au 31 décembre de l’année pour laquelle l’impôt était dû, étant précisé que les dispositions de la LIPP autorisaient la déduction des dettes chirographaires ou hypothécaires effectivement dues par le contribuable et justifiée par titre, extrait de comptes, quittance d’intérêts ou déclaration du créancier.

L’arrêt du Tribunal fédéral a précisé encore : « que, à l’instar des dettes fiscales ordinaires, les dettes de rappel d’impôts peuvent donc être déduites de la fortune brute même si elles ne sont pas encore chiffrées à la date déterminante ».

Le Tribunal fédéral a donc expressément confirmé la déductibilité des dettes fiscales qu’elles soient ordinaires ou de rappels d’impôts lorsque celles-ci existaient avant le 31 décembre de la période fiscale, quand bien même ces dettes n’étaient pas encore échues.

En d’autres termes, l’AFC ne pouvait pas traiter différemment les contribuables repentis des autres contribuables en ce qui concernaient les montants d’impôts dus à l’Administration et par là-même punir un contribuable ayant procédé à une déclaration spontanée visant à régulariser ses errements du passé.

De cela et d’autres choses l’on pourra débattre lors de la prochaine Assemblée générale de l’AGEDEC.

Publiée le 24 août 2015

 

Annexe : convocation à l’Assemblée générale

135 Assemblée générale 27.8.15

 

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Par Maître Michel LAMBELET Avocat – expert en fiscalité.

Tout l’immobilier, la Chronique de l’AGEDEC, (Association genevoise pour la défense du contribuable), association créée en 2005 dont les membres fondateurs ont été Monsieur et Madame LARPIN ainsi que Me LAMBELET.

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